Cancer du sein : les biomarqueurs circulants, une révolution en marche pour le suivi personnalisé

À retenir

  • La biopsie liquide permet d’analyser des marqueurs tumoraux détectés dans le sang (protéines, ADN, cellules).
  • Le ctDNA (fragment d’ADN) et les CTC (cellules tumorales circulantes) offrent des outils pronostiques et de suivi thérapeutique très prometteurs.
  • Les mutations ESR1 guident désormais des adaptations thérapeutiques ciblées (élacestrant, camizestrant).
  • Les essais PADA-1 et SERENA-6 confirment qu’un suivi du ctDNA peut orienter précocement le traitement et améliorer la survie.

Malgré les progrès thérapeutiques, le cancer du sein reste le plus fréquent chez la femme (33 % des cancers féminins) avec 61 214 nouveaux cas en 2023. Il est la première cause de mortalité par cancer (12 757 décès en 2022). Les rechutes sont assez fréquentes (15 à 20 % sur 10 ans).
Le dépistage repose sur la mammographie proposée tous les 2 ans entre 50 et 74 ans, détectant 60 % des cancers à un stade précoce. 

La biologie médicale occupe une place croissante dans le suivi du cancer du sein, portée par l’émergence des biomarqueurs circulants à différents stades de la maladie.

Quelles applications cliniques peut-on attendre des biomarqueurs circulants dans le cancer du sein ?

La biopsie liquide, qui détecte les biomarqueurs circulants dans le sang, constitue une avancée majeure offrant plusieurs applications cliniques :

  • le diagnostic et le pronostic – la nature et la quantité des éléments circulants informent sur la sévérité et la diffusion tumorale ;
  • le suivi thérapeutique – l’évolution des biomarqueurs reflète la réponse au traitement ;
  • la prévention des rechutes – leur réapparition après traitement peut signaler une maladie résiduelle et annoncer une rechute potentielle.

Moins invasive qu’une biopsie classique, elle est répétable sans altérer la qualité de vie et pourrait, à l’avenir, compléter la mammographie pour le dépistage.

Quels sont les différents types de biomarqueurs circulants dans le cancer du sein ?

Les biomarqueurs circulants regroupent plusieurs composants d’origine tumorale détectables dans le sang. On distingue :

  1. Les marqueurs tumoraux protéiques :

Le CA 15-3, antigène dérivé de la mucine MUC-1, exprimé à la surface des cellules tumorales mammaires, est le principal biomarqueur utilisé en pratique. 

Il joue un rôle pronostique et de suivi dans le cancer du sein métastatique, notamment par le dosage sériel, qui permet d’évaluer la réponse thérapeutique.

  1. Les marqueurs circulants moléculaires (ctDNA – fragments d’ADN tumoral).

Leur évaluation a montré qu’ils constituent un outil pronostique et de suivi thérapeutique :

  • un taux élevé de ctDNA dans les cancers du sein localisés ou métastatiques indique une évolution défavorable ;
  • la persistance du ctDNA après traitement signale un risque accru de rechute ;
  • le suivi sériel du ctDNA reflète l’efficacité du traitement ;
  • ils permettent d’identifier des mutations génétiques, telles qu’ESR1, orientant l’utilisation de traitements ciblés comme l’élacestrant, indiqué dans les tumeurs HR+/HER2– porteuses de cette mutation, dont la recherche est devenue systématique. 
  1. Les marqueurs circulants cellulaires (CTC – cellules tumorales circulantes)

Cellules tumorales entières issues de la tumeur primaire ou métastatique, les CTC peuvent également jouer un rôle dans la prédiction du pronostic et le suivi de la réponse au traitement dans le cancer du sein métastatique. Par exemple, leur persistance plusieurs années après une chimiothérapie adjuvante prédit une rechute tardive. 

  1. Les biomarqueurs protéiques associés aux vésicules extracellulaires 

Ces protéines encapsulées dans des vésicules libérées par les cellules tumorales constituent une voie émergente de recherche. Par exemple, l’énolase 1 a fait l’objet d’une étude prometteuse dans le diagnostic précoce du cancer du sein.

Quelle est la situation en France ?

Des tests permettent déjà d’exploiter certains biomarqueurs, mais leur utilisation n’est pas encore autorisée en France. En effet, les études n’ont pas montré que la détection précoce d’une rechute améliore la survie des patientes métastatiques.
Cependant, ces outils pourraient favoriser une désescalade thérapeutique, en réduisant les traitements chez les patientes sans maladie résiduelle.

Quel est l’impact de la recherche clinique pour transformer ces découvertes en bénéfices concrets pour la pratique médicale ?

L’essai de phase III PADA-1 a évalué chez des patientes atteintes d’un cancer du sein métastatique RH+/HER2– l’intérêt d’un suivi sériel du ctDNA pour détecter l’émergence d’une mutation ESR1 sous inhibiteur de l’aromatase (IA) et palbociclib.
Lorsqu’une mutation ESR1 que l’on sait liée à une résistance acquise aux IA était identifiée et, avant toute progression radiologique, un changement précoce de traitement vers fulvestrant et palbociclib était proposé. L’étude a ainsi montré un allongement significatif de la survie sans progression avec cette nouvelle combinaison thérapeutique par rapport à la poursuite du traitement initial.
Un autre essai de phase III (SERENA-6), inspiré de l’essai PADA-1, a étudié chez des patientes métastatiques RH+/HER2– l’intérêt d’un monitorage du ctDNA pour détecter l’apparition de mutations ESR1 sous traitement par inhibiteur de l’aromatase et inhibiteur CDK4/6 (Cyclin-Dependent Kinases 4 et 6).
En cas de mutation émergente ESR1 et avant toute progression clinique, une orientation thérapeutique anticipée vers camizestrant et un inhibiteur CDK4/6 a permis de réduire de façon significative le risque de progression ou de décès par rapport à la poursuite du traitement standard.
Ces travaux confirment la valeur prédictive du ctDNA et constituent les premières preuves cliniques que la biopsie liquide peut guider un changement thérapeutique efficace, en anticipant la résistance avant qu’elle ne devienne cliniquement apparente.

Enfin, l’essai de phase II CUPCAKE, dont le démarrage est prévu fin 2025, visera à évaluer l’intérêt d’un suivi du ctDNA pour détecter précocement une récidive du cancer du sein triple négatif, avant l’apparition de tout signe clinique.

SOURCE: http://univadis.fr/viewarticle/cancer-du-sein-biomarqueurs-circulants-r%C3%A9volution-2025a1000wue?uuid=4d0b5ca8-2b3f-45ae-8005-5cb11121ec81&_gl=1%2a1jl0wxw%2a_up%2aMQ..%2a_ga%2aMjExMDI4MDQyNy4xNzY2NDgxMzQ4%2a_ga_BR3MV9G8Q9%2aczE3NjY0ODEzNDckbzEkZzEkdDE3NjY0ODEzNjYkajQxJGwwJGgw

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Pr Abderrahim Aboulfalah
Pr Abderrahim Aboulfalah

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